Leader européen de l’analyse RH, Fosway Group a publié fin 2018 deux études sur les évolutions que perçoivent et attendent les managers RH européens, particulièrement en matière de systèmes d’information et de digital learning. Il en ressort que les enjeux et les objectifs sont assez clairement appréhendés, mais que la transformation digitale est encore loin d’être parachevée.

L’agilité s’impose décidément comme une valeur en hausse dans le monde de l’entreprise. C’est le premier constat général qui ressort de la 6e étude annuelle « HR Realities » (les réalités en matière de ressources humaines) menée par Fosway Group en partenariat avec Unleash(1) auprès de plus de 500 hauts responsables RH européens.

L’agilité est désormais considérée comme le deuxième enjeu/levier d’évolution par 86 % des professionnels des RH, immédiatement après l’augmentation de la performance et de la rentabilité (91 %). « L’époque où il fallait plus de 18 mois pour développer et déployer un logiciel devient un lointain souvenir, résume David Wilson, CEO de Fosway Group. Il est aujourd’hui indispensable d’évoluer au rythme de l’entreprise, en particulier en ce qui concerne la HR Tech(2). »

Au delà de l’automatisation…

Pour instaurer des fonctionnements plus agiles, les DRH comptent beaucoup sur la technologie, d’autant que près d’un tiers d’entre eux s’attendent à une réduction des effectifs RH au cours de l’année à venir. Tout ce qui peut contribuer à faciliter et à fluidifier la gestion courante (gestion du temps et des performances, paie, conformité…) est donc le bienvenu.

Mais au-delà de l’automatisation des tâches sans valeur ajoutée humaine, les outils digitaux d’analyse des données et d’aide à la décision ont aussi vocation à mieux appréhender des sujets de fonds tels que les plans de succession, la mobilité professionnelle, les stratégies d’acquisition et de fidélisation des talents, les programmes et méthodes de formation, etc. De ce point de vue, il y a encore matière à progresser.

Selon Fosway Group, si 76 % des organisations augmentent leurs investissements dans la HR Tech, 68 % d’entre elles estiment que leurs systèmes d’information des ressources humaines (SIRH) ne sont pas prêts à intégrer les nouveaux modes de travail et les nouvelles attentes des collaborateurs.

Les talents d’aujourd’hui exigent une expérience fluide

Quels objectifs privilégier lorsque l’on entreprend de transformer ces SIRH ? Avant tout, celui d’améliorer la qualité de l’expérience-utilisateur, répondent 86 % des managers interrogés. Les objectifs d’agilité business, de capacité à innover et de mise à disposition d’outils en self-service (permettant aux collaborateurs d’effectuer des opérations en toute autonomie), qui relèvent de la même problématique générale, obtiennent tous trois un score de 84 %.

À la question « que voulez-vous faire évoluer en matière de ressources humaines dans les deux ans à venir ? », on note que les deux sujets les plus fréquemment cités sont le recrutement (52 % des répondants) et surtout le parcours d’intégration des nouveaux collaborateurs que les Anglo-saxons appellent l’onboarding (56 % des sondés). « En France, un salarié sur cinq démissionne avant trois mois à cause d’une mauvaise intégration, souligne Jérémy Clédat, CEO et co-fondateur de Welcome to the Jungle (un site conçu à la fois comme un média d’information sur le monde du travail et une plateforme de recrutement). 4 % décident même de partir à cause d’une première journée désastreuse ! ».

Dans un contexte où il devient difficile de recruter et retenir les jeunes talents, il convient de choyer les nouveaux arrivants. Et cela passe en grande partie par des outils et des interfaces digitaux ad hoc.

Le big data au service de la personnalisation

Dans quels domaines et sur quels sujets les RH pourraient-elles faire appel à l’intelligence artificielle ? A cette question, les DRH évoquent respectivement les outils innovants du type chatbots (70 %) et les dispositifs de présélection des candidats à l’embauche (58 %). Mais pas seulement.

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Les managers interrogés mentionnent également les applications d’analyse prédictive (76 %), ainsi que les tableaux de bord et les outils de reporting (58 %). 95 % des répondants estiment que la qualité des données et celle des outils analytiques constituent des facteurs clés de succès.

Dans un article publié le 15 janvier par la tribune.fr sous le titre « Comment le Big Data bouleverse la gestion des ressources humaines », Clotilde Coron, maître de conférences à l’Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, explique qu’il ne s’agit plus de « fournir un reporting uniquement descriptif, mais bien de mobiliser les données pour mieux comprendre un phénomène, dans une optique d’amélioration de la prise de décision ».

Elle pointe en particulier les enjeux de personnalisation. « En mobilisant des données, et surtout un grand nombre de données, on peut parvenir jusqu’à une prise en compte très individualisée des salariés, écrit-elle. Cet objectif apparaît directement lorsqu’il s’agit de proposer aux collaborateurs des suggestions “personnalisées” de postes ou de formations. »

Le e-learning est devenu digital learning

Fosway Group a diffusé également en 2018 les résultats d’une autre étude (920 répondants) portant spécifiquement sur les tendances en matière de digital learning, c’est-à-dire sur la façon dont le digital transforme plus spécifiquement ce qui concerne la formation et le développement des compétences (learning & development ou L&D).

On note au passage que le terme de e-learning, apparu dans les années 2000, apparaît déjà comme vieillissant car il ne suffit plus à rendre compte du foisonnement introduit par le digital dans la formation professionnelle. Le digital learning, lui, couvre un large éventail de formats digitaux : vidéos, classes virtuelles, modules d’apprentissage interactifs, blogs, forums, communautés en ligne…

Autre différence avec le e-learning, le digital learning qui n’oublie pas les applications mobiles, s’inscrit dans une approche “multi-devices” : l’accès au contenu pédagogique depuis tout appareil (ordinateur, smartphone ou tablette) devient une attente incontournable.

Ecosystèmes d’apprentissage numérique

Où en est-on dans la réalité ? 71 % des répondants à l’étude Fosway Group estiment que la révolution du digital learning est en cours dans leur entreprise (elle est « planifiée » pour 20 %, « achevée » pour 5 % et « sans objet » pour 4 %).

Il ressort aussi qu’en 2018, la moitié des DRH interrogés ont augmenté leurs investissements en digital learning, particulièrement pour développer les contenus et améliorer le fonctionnement des plateformes.

« La formation et le développement des compétences doivent être pilotés (plutôt que supportés) par le digital, souligne Fosway Group en commentaire de ces résultats. Cela a des implications majeures sur les choix des fournisseurs, ainsi que sur la façon dont les différentes briques qui leur sont achetées se complètent les unes avec les autres. Si elles veulent aller de l’avant, les entreprises doivent trouver comment mettre en place des écosystèmes d’apprentissage numérique cohérents. ».

En clair, lorsque les DRH s’appuient sur les bons partenaires et des politiques structurées, le digital learning se déploie et donne des résultats réellement satisfaisants.

Or dans la même étude, quand on leur demande dans quelle mesure le L&D fait l’objet d’une approche stratégique formalisée au sein de leur entreprise, 52 % des managers RH répondent que c’est partiellement le cas (pour 15 %, l’approche est très standardisée et, pour 33 %, elle ne l’est pas du tout).

Les HR tech se déploient, mais les pratiques peinent à se transformer

Les DRH sollicités par Fosway Group ont été invités à préciser les innovations qu’ils jugent prioritaires de développer. Côté contenus, ils plébiscitent la vidéo, les interfaces mobiles, ou encore les outils de microlearning (séquences courtes associant image, texte et sons).

En matière de plateformes, ils attendent des outils qui renforcent l’engagement de l’apprenant, intègrent la dimension sociale et collaborative ou, encore, qui facilitent la mobilité. « Les Next Gen Learning Environments [ou NGLE] continuent à disrupter le marché et sont adoptés de façon de plus en plus massive », rappelle Fosway Group.

En toute logique, ce sont sur les contenus courts et les parcours de formation personnalisés que les managers RH s’attendent à voir leurs approches évoluer sur un horizon d’un an. « Ces pratiques ont le vent en poupe, mais à ce jour, elles sont encore loin d’être généralisées. » relativise toutefois Fosway Group, signalant notamment que si l’on parle beaucoup de gamification (ou ludification, en français, c’est-à-dire l’utilisation du jeu dans la formation), les réalisations concrètes restent relativement rares.

Un processus et un voyage

Alors que l’approche « des ressources, et non des cours » semble toujours plus plébiscitée, les acteurs les plus innovants explorent en particulier les méthodes pragmatiques et conceptuelles de l’agile learning et de l’action learning.

Pour les analystes de Fosway Group, cela évite notamment de tomber dans un piège classique : celui de (trop) s’appuyer sur des contenus préexistants. « L’apprentissage est un processus et un voyage, écrivent-ils. Le contenu seul ne sera jamais qu’une partie de la réponse. L’idée que le digital learning est déconnecté des ressources humaines relève du mythe, signale aussi Fosway Group. Dans la réalité, seuls 35 % des systèmes fonctionnent indépendamment des services RH. »

Ceux-ci gardent donc largement la main et restent les premiers artisans des transformations en cours.



(1) Salon européen des HR Tech (ex HR Tech World), Amsterdam.

(2) Les technologies ou solutions digitales dans le domaine des ressources humaines.

 

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