Directeur général de Gindre Duchavany, François Luneau fait partie des dirigeants d’ETI qui suivent d’un œil très attentif les évolutions technologiques susceptibles de transformer en profondeur les process industriels. Il a suivi avec intérêt la conférence organisée sur ce thème par Randstad Inhouse, le 15 octobre dernier à Lyon. Interview.

En quoi la question de l’industrie 4.0 et de la robotique revêt-elle une dimension stratégique pour votre entreprise ?

Nous opérons dans le secteur métallurgique, donc dans une industrie assez lourde dont on pourrait imaginer qu’elle reste assez loin des problématiques d’automatisation, d’objets connectés et d’usine du futur. Pourtant, bien au contraire, nous sommes aujourd’hui au cœur de ces réflexions et de ces perspectives. La complexité de nos systèmes va croissant et, comme nos clients ont de moins en moins de visibilité sur leurs flux d’activité, ils nous demandent de travailler de façon de plus en plus agile. Nous devons donc pouvoir réagir toujours plus rapidement à leurs demandes. Et ce, en restant, évidemment, les plus compétitifs possibles. Tout cela nous amène à nous intéresser de très près à ce que peut nous apporter la robotique, qu’elle soit mobile ou non, mais aussi à ce qui relève de l’analyse de données, de la réalité augmentée… Nous réfléchissons beaucoup sur ces sujets, et nous commençons même à agir.

Sur quels projets concrets avez-vous le plus avancé ?

Pour l’instant, nous avons surtout des robots fixes. Mais dans les mois et les années à venir, nous envisageons d’intensifier nos investissements dans la robotique mobile, qui apporte des solutions particulièrement pertinentes pour une organisation comme la nôtre. Dans notre activité, ce que l’on appelle la “transitique” s’avère absolument critique. En clair, nous passons beaucoup de temps à transporter des objets lourds d’un point A à un point B. C’est pourquoi nous sommes plus spécifiquement intéressés par les robots porteurs de charge et tout ce qui permet de transférer des objets lourds à l’intérieur d’une usine.

D’une part, cela correspond tout simplement à une logique d’optimisation des coûts. Payer des gens pour transporter des objets dans une usine, cela n’a pas beaucoup de sens aujourd’hui. D’autre part, cela peut renforcer considérablement la fluidité globale de notre production. Nos process actuels se traduisent, en effet, par des temps d’attente excessivement longs, des systèmes de FIFO* qui ne sont pas toujours bien respectés… Si nous pouvons, grâce à la robotisation, amener de l’intelligence dans toute cette gestion des flux physiques, nous serons en mesure de nous adapter aux besoins de nos clients avec toute la souplesse aujourd’hui requise.

Enfin, c’est évidemment un enjeu de santé au travail, tout simplement parce que la manutention d’objets lourds pose des problèmes aux opérateurs.

Vous avez des usines en France, en Allemagne, en Slovaquie et en Inde. Où déployez-vous vos robots ?

Surtout en France. Il est évident qu’aujourd’hui, la question ne se pose pas dans les mêmes termes dans des pays comme l’Inde ou la Slovaquie. Dans la mesure où la main-d’œuvre y coûte beaucoup moins cher, le ratio gain sur investissement est nettement moins intéressant.

La problématique de la création et de la destruction d’emplois a beaucoup été évoquée lors de la conférence et des échanges qui ont suivi. Au vu de votre activité, quels types de nouveaux métiers voyez-vous émerger autour de l’industrie 4.0 et de la robotisation ?

Très honnêtement, nous manquons encore beaucoup de visibilité sur ce point. Ce que nous pouvons dire, c’est qu’à une certaine époque, nous imaginions que nous devrions avoir des collaborateurs qui travailleraient exclusivement sur des robots. Il nous semblait qu’une ETI comme la nôtre n’aurait pas forcément la taille critique pour ce type de poste. Or aujourd’hui, nous constatons que le sujet de la robotique et de l’industrie 4.0 est, en fait, très vaste et ouvre un panel de postes particulièrement large. Nous réalisons aussi à quel point toutes ces nouvelles générations d’outils vont pouvoir nous aider à développer de nouveaux champs d’action que nous n’explorons pas encore aujourd’hui : produits, services, marchés à investir… Nous aurons besoin dans les années qui viennent de professionnels de l’amélioration continue ou du développement qui, à ce titre, travailleront sur une multiplicité de sujets : robotique mobile, mais aussi réalité augmentée, analyse de la donnée ou maintenance prédictive. Tout cela va générer un besoin de compétences variées couvrant aussi les champs de l’automatisme, de la mécatronique… Mais encore faudra-t-il les trouver ! Or aujourd’hui, nous sentons bien que les prestataires ont déjà du mal à répondre aux demandes, en particulier pour l’intégration des robots dans les processus de production. Je confirme qu’il y a là, notamment en France, un très fort enjeu de compétences, et donc de formation.

Gindre Duchavany en bref

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Bientôt bicentenaire, l’entreprise Gindre Duchavany (créée en 1823 par Charles-Marie Duchavany) a été acquise en 2015 par le groupe helvétique ALPIN AG. Figurant aujourd’hui parmi les tous premiers spécialistes mondiaux du conducteur cuivre pour équipements électriques, elle produit des barres de cuivre méplates, rondes, perforées, taraudées, souples, isolées… Ses deux usines françaises, implantées à Pont-de-Chéruy et à Chavanoz (Isère), emploient au total près de 500 salariés.

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* FIFO pour First In-First Out (premier arrivé, premier sorti). Cette règle de gestion consiste à prélever les marchandises du stock en suivant l’ordre d’arrivée chronologique. Ce fonctionnement permet de résoudre des problématiques de dégradation par le temps, denrées périssables ou d’obsolescence.

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